laurence villevieille auteure

Une jeunesse sacrifiée ?

J’étais dans ma voiture hier, avec ma fille de 15 ans et une chanson passait à la radio. Une (très) jeune femme chantait, sa voix était divine et je me suis mise à écouter plus attentivement les paroles qui sortaient des enceintes. Au bout de trois phrases, je comprends qu’il s’agit d’un texte ayant pour objet d’interpeller les adultes actuels (donc nous, donc moi) sur l’état du monde que nous leur laissons, s’adjurant à nous rappeler qu’ils n’ont pas voulu ça et que leur avenir apparaît bien morose.

Et là, ces mots sont montés en moi :

Marre de toutes ces voix qui s’élèvent un peu partout pour parler de la jeunesse sacrifiée ! Problèmes environnementaux, économiques, sociétaux et j’en passe, nous sommes sur le point de laisser aux générations futures un monde sens dessus dessous, qui a perdu tout son sens et qui marche sur la tête. Nous leur laissons un décor dans lequel ils n’ont, bien évidemment, aucune envie de se projeter.

laurence villevieille auteureEt si c’était leur chance ?

Si c’était, pour eux, une occasion en or de tout transformer, de repartir de zéro ?

N’est-il pas plus enthousiasmant de se trouver face à une situation où tout est à faire, à inventer, autrement, plus en adéquation avec les valeurs qu’on sent essentielles, que de se voir confier les clés d’un monde « tout prêt », au sein duquel la seule consigne est de continuer comme avant ? Leurs propositions en auront peut-être plus de poids. A condition de passer plus de temps à proposer qu’à accuser…. Je ne sais pas si vous voyez à quoi je pense …?

Marre de les poser en victimes à cause d’une culpabilité assise sur un passé mal assumé !

 

De mauvais choix ont été faits et les répercussions nous atteignent de plein fouet. Et alors ?

Est-ce que nous continuons à (nous) faire des reproches ou est ce que nous nous efforçons de faire des propositions nouvelles, de construire un monde différent, de porter haut ce qui nous semble désormais essentiels et que nous n’avons pu enfin nommer que parce que cela nous a manqué à un point tel que cela en est devenu insupportable ?

La vie est faite de cycles, ce qui signifie inexorablement des débuts et des fins, chaque fin marquant un commencement.

Nous sommes à la fin d’un monde et c’est une bonne nouvelle ! Une nouvelle expérience nous attend.

satprem

Dans une vidéo intitulée « L’homme après l’homme », Satprem fait un parallèle éloquent pour expliquer ce qui est en train de se produire : il dit que nous sommes en train de vivre une expérience équivalente à celle qu’a vécu le poisson lorsqu’il est sorti de l’eau et qu’il lui a fallut apprendre à respirer autrement. Toutes ses cellules ont dû s’adapter, imaginer un nouveau process qui lui permette de survivre et de continuer l’aventure.

Nous en sommes là.

Que ce soit au sein de notre microcosme intérieur, où chacune de nos cellules est en train d’intégrer des nouveaux codes grâce à la remise en cause de toutes nos croyances limitantes et asservissantes, ou que ce soit dans la société humaine au cœur de laquelle chaque individu, tel la cellule particulière portant une part de l’ensemble, sera appelé à mettre en œuvre de nouvelles façons de vivre, tout concourt à déployer une nouvelle humanité que j’aime appeler « augmentée », alignée sur ce cœur qui bat, qui pulse à chaque instant en chacun et qui ne demande qu’à être entendu…

laurence villevieille auteureEst-ce que nous continuons à nous plaindre de la déliquescence de ce modèle, à nous accrocher à ce que nous croyons être en train de perdre ou est ce que nous choisissons de nous retrousser les manches et de nous autoriser, enfin, à manifester nos rêves les plus enthousiasmants ?

Non cette jeunesse n’est pas sacrifiée ! Sauf à croire qu’elle ne peut connaître le bonheur que dans la perpétuation d’un modèle qui arrive au bout, qui nous montre de manière radicale qu’il ne peut pas répondre à cette aspiration-source, légitime : vivre dans la paix et dans la joie, individuellement et collectivement.

 

laurence villevieille auteureL’imagination des générations futures alliée à celle de cette jeunesse inspirée nous portera vers un monde plus grand et cela n’aura été possible que parce que la matrice actuelle est en train de s’effondrer. Il ne s’agit plus de rafistoler, d’améliorer, de trouver des solutions à des problèmes qui n’existent que parce qu’ils sont les fruits du modèle actuel. Il faut voir grand, il faut voir loin, il faut oser. Einstein disait : « La folie c’est de refaire la même chose et d’en attendre un résultat différent ».

En tant que thérapeute, je suis régulièrement interrogée par des parents écartelés entre les modèles qu’ils ont reçus en héritage et les aspirations nouvelles de leurs adolescents.

Je n’ai, à chaque fois, qu’une réponse : « Comment voulons-nous voir émerger ce monde différent auquel nous aspirons si nous continuons à demander à nos enfants de mettre leurs pas dans les nôtres ? »

Que ferons-nous ? Que fera la jeunesse ? Et si au lieu de les voir comme des victimes, nous leur faisions confiance ?

 

© Laurence Villevieille – Décembre 2019