Accueillir mon humanité
Identifier en soi ce qui relève de l’illusion du point de vue des enseignements spirituels n’est pas suffisant. M’en détourner au motif que cela n’aurait aucune réalité et « choisir » de ne pas l’alimenter en portant mon attention sur mon espace de vérité intérieur n’a aucun sens pour moi.
Comment ma part humaine peut-elle être transcendée si je ne l’accueille pas ?
Comment ce qui en moi se nourrit de « mensonge » pourrait s’alchimiser si je ne lui ouvre pas les bras ?
Nombre d’enseignements spirituels nous invitent à faire le tri et à « étiqueter » : vrai ou faux, nous assurant, par cette discrimination, la possibilité de rencontrer ce que nous sommes « vraiment ». Combien évoque ce que nous pouvons offrir à ce qui fait mal en nous ? L’Amour est la force de « guérison » ultime. Rien ne peut se transmuter sans une reconnaissance totale de la pertinence de nos mouvements intérieurs et une fusion absolue avec ce qui est révélé dans l’instant, même et surtout, vis-à-vis de ce qui relève de l’illusion ou des prétendus mensonges de l’Ego.
le mensonge de l'Ego
L’Ego ne ment pas. Il a juste un autre point de vue. Nier ça revient à refuser toute légitimité à celui qui ne pense pas comme moi, établissant, de fait, l’idée d’une vérité absolue, opposable à tous.
L’Ego ne se trompe pas. Comment l’amener à faire évoluer son regard si nous ne l’accueillons pas avec amour ? Croyons-nous vraiment que le regarder dans les yeux en lui disant : « Tu mens ! » lui permettra de reconsidérer sa croyance ?
Cette forme d’autoritarisme n’est qu’une violence de plus vis-à-vis d’un Ego sans cesse diabolisé qui, malgré toutes nos réticences à l’entendre, fait partie intégrante de nous. Autrement dit, il s’agit encore d’une violence perpétrée contre nous-même.
Bien sûr que sur le plan de l’Ame toutes les croyances et blessures de l’Ego reposent sur une illusion. Mais dans mon humanité, ces blessures sont « réelles » et m’impactent à chaque instant.
Accueillir & accompagner
Est-ce que quand mon enfant a mal et vient vers moi les yeux pleins de larmes, je me contente de le renvoyer à ses jeux et lui affirmant que « cela n’est rien » ?
Non, je lui ouvre mes bras et je lui permets de verser toutes les larmes que la situation lui inspire. Je ne cherche pas à le consoler car ce serait nier sa douleur. Je ne lui propose pas de regarder ailleurs en cherchant à le distraire de ce qui l’agite car ce serait considérer que cela ne mérite aucune attention.
J’accepte de ressentir ce que son émotion met en mouvement en moi et je reste, avec lui, dans cet espace qui ne demande qu’à être reconnu. Alors, cela étant accompli, il retournera à ses jeux, ayant réalisé instantanément la dissolution de cet espace de douleur.
Voilà ce qui peut être offert à chaque espace mémoriel, à chaque illusion, à chaque croyance limitante : La reconnaissance que du point de vue qui était le mien, je n’avais pas d’autre choix que de voir la situation comme je l’ai vue.
Et cela est suffisant pour tout changer.
Je me refuse à considérer l’Ego comme une part de moi qu’il me faudrait « asservir » en un retournement de pouvoir de moi vers lui. C’est encore séparer.
Je choisis de l’aimer parce que c’est la seule « chose » que je puisse « faire » en réalité si je me reconnais dans mon essence première. Je choisis de l’écouter à chaque instant afin de lui offrir cet endroit de rencontre amoureuse chaque fois que, de son point de vue, il détecte une occasion de souffrir.Je peux tout aimer de ce qui me traverse ; je suis assez vaste pour tout rencontrer. Il n’y a rien à changer, aucune erreur à corriger. Les transformations qui pourraient s’opérer se réalisent « naturellement », au moment juste et sont toujours conditionnées au fait que les expériences proposées aient été accueillies et goutées.
© Laurence Villevieille – Novembre 2018